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La chronique ABO

Rando un jour, rando tous les jours

11.07.2025

Dans notre pays, les personnes adeptes de la randonnée pratiquent cette activité en moyenne quinze fois par an, selon la dernière édition de l’étude «Sport Suisse light». Randonner un peu plus d’une fois par mois, c’est déjà pas mal, certes. S’y adonner au quotidien, c’est encore mieux! Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’y a pas forcément besoin pour cela de vivre au pied d’une montagne, voire d’être gardienne de cabane.

Prenons mon exemple: citadine endurcie, j’utilise depuis des années ma pause de midi pour aller me dégourdir les jambes. Une bonne demi-heure de marche d’un pas énergique, les écouteurs vissés sur les oreilles, la tête dans les nuages. Lorsque je retourne au bureau, le ventre agréablement gargouillant, je déballe sandwiches et thermos de tisane, que je savoure tranquillement derrière l’écran de mon ordinateur.

Au fil du temps et de mes explorations urbaines, ces balades se sont muées en excursions. J’ai appris à dénicher – merci la fonction satellite de Google Maps! – des pépites vertes cachées, ces petits coins de nature de proximité qui montrent à quel point, en Suisse du moins, la campagne fait régulièrement des incursions en ville. Ce que j’ai constaté dans la foulée, c’est que les semelles de mes Birkenstock (en été) et de mes sneakers (le reste de l’année) ont eu tendance à être de plus en plus sales et rapidement usées.

Pieds nus, ventre plein

Il y a quelques semaines, suite à un déménagement professionnel, ces promenades quotidiennes se sont carrément transformées en mini-randos. Mon nouveau lieu de travail se situe sur le flanc inférieur du Gurten, l’emblématique colline qui sert de poumon vert aux habitantes et habitants de la capitale fédérale. La première fois que je suis sortie faire ma balade de midi, je me suis sans réfléchir engagée sur le sentier pédestre grimpant dans la forêt en direction du modeste sommet.

Quinze minutes de montée plus tard, j’émergeais du couvert des arbres et me retrouvais dans une clairière verdoyante, au milieu d’un troupeau de vaches. Au loin se dessinaient les contours des Alpes bernoises. Me faisant violence pour ne pas continuer mon ascension, j’ai suivi les conseils d’un serviable panneau indicateur jaune m’invitant à emprunter un étroit chemin de terre redescendant en direction de mon bureau.

C’est seulement un peu plus bas, alors que je ne cessais de glisser sur le revêtement naturel encore légèrement humide suite aux averses de la veille, que j’ai réalisé que les Converse sans profil que je portais ce jour-là n’étaient de loin pas adaptées à un sentier aussi escarpé. De retour au bureau, j’ai retiré mes sneakers boueuses sous le regard amusé de mes collègues et ai mangé mon lunch pieds nus.

Le choc des cultures

Depuis, j’emporte quasi systématiquement une paire de chaussures de randonnée lorsque je pars travailler. Certes, elles détonnent parfois avec ma tenue de ville. Mais cette faute de goût est largement compensée par le confort, la stabilité et surtout l’imperméabilité offerts. L’autre jour, en raison d’une météo particulièrement estivale, j’ai néanmoins décidé de faire l’impasse sur un équipement ad hoc. C’est donc en robe légère et en sandales que je suis partie à l’assaut du Gurten.

Alors que j’étais en train de discuter avec l’une des vaches de la clairière – entre-temps, elles sont devenues de bonnes copines – un groupe de randonneurs seniors est passé à côté de moi sur le chemin pédestre. T-shirts techniques, sacs à dos ultralégers, bâtons: ils n’auraient pas détonné dans une pub pour une marque outdoor. Après m’avoir saluée comme il se doit en «montagne» – quelques centaines de mètres plus bas, en ville, ils ne m’auraient probablement pas adressé la parole – ils se sont éloignés d’un pas alerte, non sans se retourner de temps à autre pour me jeter des coups d’œil surpris.

Cela m’a rappelé les quelques fois où, après une longue randonnée en altitude, je me suis attablée à la terrasse d’un bistro de mon quartier pour déguster une bière bien méritée avant de rentrer prendre ma douche. Et où j’ai essuyé le même genre de regards étonnés de la part d’une clientèle principalement composée de jeunes gens branchés semblant tout droit sortis d’un magazine lifestyle. Pour le décloisonnement, il faudra repasser …

À propos

Auteur: Patricia Michaud est une journaliste indépendante francophone basée à Berne. Que ce soit à titre privé ou professionnel, elle aime les grands écarts: entre la politique et la culture, entre l’action et le repos, entre la ville et la campagne.

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